La pénurie de talents dans l’IT est une réalité, mais elle masque une autre vérité. La poignée de candidats aux postes dans l’informatique est surtout masculine. En effet, selon différentes études menées en France ou à l’étranger, les femmes restent minoritairement représentées dans les effectifs de l’IT.
Les causes de ce phénomène sont multiples. Il est primordial de les analyser pour plus de parité. Comprendre les obstacles rencontrés par les femmes dans leur carrière permettra de bouger les lignes pour accueillir plus de talents féminins dans la Tech. En agissant sur des leviers d’amélioration précis, les acteurs du secteur ont le pouvoir de créer une véritable place aux femmes dans l’IT.
Dans cet article, nous analysons ces freins et proposons des pistes de réflexion pour enclencher un nouvel essor des métiers du numérique au féminin.
Pourquoi les talents féminins sont-ils minoritaires dans l’IT
À l’origine, dans l’histoire de l’informatique, au début des années 1950, les femmes représentaient 40 % des programmeurs, chez les fabricants d’ordinateurs. Dix ans plus tard, en Grande-Bretagne, les femmes tenaient les « postes de codage » de manière majoritaire. Mais aujourd’hui, le bilan est amer. Selon l’association les Talents du Numérique, le secteur compte un peu plus de 27 % de femmes dans ses effectifs contre 46,8 % tous secteurs d’activité confondus.
L’écart se creuse encore lorsque l’on considère des profils plus techniques. Ce phénomène s’accentue également sur les fonctions de leadership où seulement 13 % d’entre elles accèdent au métier de DSI.
Les préjugés sur les compétences scientifiques et techniques des filles
Le défaut de représentation des femmes dans la Tech s’explique dès le plus jeune âge. L’éducation est la première cause du manque d’engouement des filles pour les professions scientifiques et technologiques. La présomption de leurs incompétences dans ces disciplines les prive d’emprunter ces cursus.
Ces stéréotypes transmis, souvent de manière involontaire, mais très ancrée, dans l’enseignement ou les familles, demeurent responsables de cette situation. Les femmes ont du mal à se projeter sur des fonctions présentées comme réservées aux hommes lors de l’orientation.
Ainsi, les lycéennes qui se dirigent vers une école d’informatique ou une école d’ingénieur sont toujours moins nombreuses que leurs homologues masculins. En Europe, si 57 % de l’ensemble des diplômés de l’enseignement supérieur sont des femmes, seulement 25 % détiennent un diplôme dans la Tech (étude Grande école du numérique – 2019).
À l’ère de la transformation digitale et du Big Data, les métiers de l’IT attirent les nouvelles générations, quel que soit leur sexe. Rien ne prouve que les jeunes filles s’intéressent moins à l’informatique que les garçons. Moins encouragées, sans repères, elles sont simplement démotivées pour s’engager vers ces métiers encore méconnus.

Des freins accentués à l’entrée des femmes dans la vie active
Ce phénomène persiste à l’entrée dans le monde du travail. L’absence de mentors féminins consolide ce ressenti et cette insuffisance d’appuis solides. Le manque de modèles contribue à accentuer le malaise et l’exclusion dans l’entreprise, environnement généralement dominé par les hommes.
Le risque de maternité vient, par ailleurs, freiner leur évolution professionnelle. Et cela intervient généralement au moment où les hommes accèdent à des fonctions plus importantes entre 30 et 40 ans. Ce ralentissement n’est pas nécessairement le fait de l’entreprise. Les femmes peuvent aussi éprouver une certaine pression. Certaines s’imposent parfois des choix difficiles pour répondre favorablement aux attentes « supposées » du monde du travail.
La charge mentale, reconnue plus forte chez les femmes, peut alors entraver très tôt les envies de réussite dans ce secteur réputé exigeant. Une étude américaine récente a même révélé qu’environ 50 % des femmes exerçant dans l’IT abandonnent leur carrière avant l’âge de 35 ans. (source : Accenture – Girls Who Code).
Certains points changent dans les nouvelles familles. On observe notamment une évolution vers plus d’équilibre dans la gestion des taches au sein du couple. Le congé parental a été modifié, depuis peu, en France pour améliorer la parité dans le foyer. Parallèlement, les entreprises s’adaptent et œuvrent pour plus d’égalité au travers de diverses prises de position comme le mouvement parental challenge.
Les femmes qui persistent et surmontent les obstacles d’une carrière dans l’IT apprécient les atouts indéniables de ces professions : flexibilité, autonomie et excellente rémunération. Toutefois, l’affirmation et la réalisation personnelle des femmes dans l’IT nécessitent encore d’importantes transformations. Une prise de conscience collective est fondamentale pour encourager les nouvelles générations. Elles doivent croire en leur capacité à réussir dans un secteur majoritairement masculin.

Empowerment : plus de visibilité sur la réussite des femmes dans l’IT
Pour attirer davantage de talents féminins, les acteurs de la Tech doivent donner plus de visibilité aux femmes qui ont réussi. Cette mise en lumière a pour but d’inviter les petites filles et les jeunes femmes à se projeter sur les nouveaux métiers du secteur numérique. Dans le même temps, il est essentiel de reconnaître leurs forces pour ces postes.
Éducation & Communication : les clés d’une société inclusive
La déconstruction des préjugés prend du temps. Elle commence par ériger des parcours inspirants en modèles auprès du plus grand nombre. Il est urgent de repenser la communication sur les métiers de l’IT dans le parcours scolaire, aux phases clés de l’orientation. Cet élément est primordial pour augmenter la proportion de femmes travaillant dans le secteur.
Dans les filières informatiques STIM (pour sciences, technologie, ingénierie et mathématiques), il est fréquent que les femmes ne se sentent pas à leur place. Consciemment ou non, ces idées reçues empêchent les femmes de s’approprier les disciplines « dures » que sont les STIM (STEM en anglais)
Contraindre les établissements supérieurs, les écoles d’ingénieurs, les universités et entreprises à réserver des places aux femmes, avec des quotas, n’est pas une solution. C’est pourquoi le secteur digital a plutôt intérêt à changer les mentalités. Il doit activer des leviers puissants pour créer des postes accessibles aux femmes.
On observe l’émergence d’un véritable élan sociétal pour encourage les femmes à libérer pleinement leurs capacités. Le monde de l’IT représente un formidable socle pour faire évoluer les comportements. Il leur ouvre la voie pour insuffler une nouvelle image et inspirer les femmes de demain.
Et ce tournant s’avère indispensable. Le manque de diversité soulève de vrais problèmes pour l’avenir du développement des technologies. Non seulement il contribue à pérenniser la pénurie de talents, mais il crée un déséquilibre dans l’élaboration exclusivement masculine des objets pilotés par l’intelligence artificielle. Le manque de diversité constitue alors un risque de vision unilatérale pour la conception des algorithmes.
Dans ce secteur, les femmes ont donc un réel pouvoir de transformation. Elles peuvent être valorisées pour leurs compétences, oser des prétentions salariales égales à celles des hommes et accéder aux fonctions stratégiques. Pour pallier la pénurie de talents dans l’IT, toute la filière œuvre, à présent, pour les encourager à poursuivre leur carrière dans un domaine informatique. Les acteurs de la Tech s’engagent massivement, au niveau international, sur la parité. Plusieurs mouvements ont été créés en ce sens pour faciliter l’accès à l’IT et à ses métiers. Elles ont pour but de déconstruire les clichés.

Des initiatives pour une intégration des femmes dans l’IT
En France, Inclusive Coding prône, par exemple, la mixité sociale et de genre en permettant l’apprentissage du code informatique à tous. Aux USA, Girls who code, association fondée en 2012 par Reshma Saujani, enseigne aux filles l’informatique. L’objectif global est de réduire les inégalités homme-femme dans le secteur. Leur action principale est d’intégrer des cours de sciences informatiques dès l’école primaire. C’est un levier puissant puisqu’aujourd’hui, 74 % des femmes en poste dans l’informatique ont été initiées avant l’âge de 10 ans.
Du côté des entreprises, Microsoft France montre l’exemple en adhérant à la charte #JamaisSansElles. Concrètement, à travers cette initiative du ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance, les signataires s’engagent à garantir l’expression des femmes. Elles doivent pouvoir s’affirmer, au même titre, que leurs homologues masculins. Leur place est donc assurée lors d’évènements internes, d’interventions publiques ou d’échanges avec les clients et partenaires.
L’association French Women CIO œuvre aussi dans le monde de l’entreprise avec le même but de créer plus de place pour les femmes dans l’IT. Elle veut « donner de la visibilité à toutes les femmes qui travaillent dans une DSI ou une direction digitale, afin que chacune puisse devenir à son tour un role-model. »
Pour briser le plafond de verre, les femmes doivent pouvoir prendre conscience de leur potentiel, de leur valeur au sein des équipes informatiques. Plusieurs études le démontrent : leur intégration favorisera l’innovation et permettra d’élargir durablement le vivier de talents IT.

Miser sur les points forts des talents féminins
Globalement, en informatique, les hommes occupent largement les fonctions support type Helpdesk, celles liées à l’exploitation ou la maintenance. Ces missions à dominante technique sont peu prisées du côté des femmes. D’autres postes les tentent progressivement.
Plus en phase avec leurs aptitudes et leurs appétences, ces fonctions se retrouvent dans les métiers de la Data. Les compétences en mathématiques et statistiques avancées sont indispensables pour devenir Ingénieur Big Data, Data Scientist ou Data Analyst. Mais ce ne sont pas les seules qualités requises. Et c’est justement la raison pour laquelle les femmes se reconnaissent plus favorablement dans les profils convoités.
Elles ont une vision business des chiffres et possèdent une véritable aptitude à transformer des données complexes en informations exploitables. Leur sens relationnel, leur capacité à s’adapter aux différents intervenants est un point fort essentiel. Leur aisance en gestion de projet est également un atout recherché dans ce domaine.
Enfin, leur leadership est indéniable. Leur démarche managériale, plus pragmatique et moins stratégique que celle des hommes, semble être reconnue de manière unanime. En effet, parmi les organisations les plus compétitives, on compte un nombre plus important de femmes sur les postes de management.
En conclusion, revaloriser le pouvoir des femmes est un des principaux enjeux du secteur numérique. En s’engageant pour la parité, les entreprises agissent concrètement pour leur avenir, car c’est un levier de performance avéré. Elles contribuent à réduire, de façon notable et sur le long terme, la pénurie de talents. Enfin, elles jouent un rôle décisif dans la société, en insérant plus d’inclusivité.